Les premières enquêtes d'anthrophologie psychanalytique ont eu lieu auprès des aborigènes australiens.
Chez eux, le rêve est à la fois une divinité, une catégorie du temps mythique et une expérience individuelle qui s'inscrit dans une pratique sociale.
Chez eux, le rêve est à la fois une divinité, une catégorie du temps mythique et une expérience individuelle qui s'inscrit dans une pratique sociale.
A la fin du XIXe siècle, lorsque les premiers missionnaires s'installèrent en Australie parmi les aborigènes Arandas, il se trouvèrent confrontés à un terme qui revenait sans cesse: alchera, qu'ils traduisirent par Dieu. Aux alentours de 1925, l'ethnologue Baldwin Spencer découvrit que le mot utilisé renvoyait à tout ce qui est associé aux temps fondateurs, mythiques, lointains et mystérieux, en d'autres termes aux rêves. Il semble en effet que pour les Arandas, tout ce qui les entoure, tout ce qu'ils voient, tout ce qu'ils font procède de ce qui a été établi dans le passé, et remonte, selon l'expression de l'ethnologue américain Radcliffe Brown, à l '" aurore du monde ". Demander à un Aranda quel était son rêve revient à le questionner sur son totem culturel ou le nom du grand mythe et du rituel auquel il a été invité. Chez les aborigènes d'Australie tout procède en effet du rêve: un ancêtre est un " être du rêve ". Le rêve renvoie avant tout à une temporalité originaire, à un état passé; les hommes sont censés soutenir sa perpétuation en réitérant les actes ancestraux transmis de génération en génération. Chez leurs voisins Warlpiris, comme l'a décrit l'ethnologue Barbara Glowczewki, si le rêve est Loi, ce n'est pas parce que les hommes font " comme dans le rêve ", mais parce qu'ils le " suivent à la trace "; leurs actions consistent à transformer les images rêvées en les actualisant par des gestes les rites -, qui viennent donner sens aux mots - les mythes. Rêve-pluie-eau arrivé après Rêve-éclair, croisant d'autres rêves, tels Homme-initié ou Bâton-à-fouir, Rêve-varan du séducteur ou de la séduite, sans qu'il n'y ait de cesse les " esprits-enfants " (kurruwalpa), gardiens du rêve de leurs pères, s'incarnent dans les hommes qui produisent des images-forces, (kuruwarri) par leurs rites, actualisant ainsi les noms et les itinéraires totémiques (jukurrpa). Les aborigènes d'Australie vivront tant que vivront leurs rêves.
Le temps du rêve
Le Temps du Rêve, aussi appelé le Rêve, est un terme commun dans la narration animiste de la création du monde chez les Indigènes d’Australie. Le Temps du Rêve explique les origines de la création du monde mais aussi la création d’une personne ou d’un groupe. Le Rêve peut être perçu comme le « temps sans fin » de la création originelle et de la création perpétuelle.
En outre, ce terme s’applique aux endroits d’Australie où les esprits de la création non-créée et les ancêtres totémiques (similaires aux genius loci) résident. Aucun mot anglais n’exprime correctement le concept du Rêve. Les Anangu qui parlent Pitjantjatjara utilisent le mot Tjukurpa ; ceux qui parlent Yankunytjatjara utilisent le motWapar. Dans les deux cas, aucun des termes aborigènes ne signifient « Rêve » dans le sens anglais ou français.
Le Temps du Rêve revêt plusieurs significations selon les groupes aborigènes. Il peut être vu comme l’incarnation de la création qui donne sens à tout. Il établit les règles régissant les relations entre les individus, la terre et toutes les choses.
Le Temps du Rêve désigne l’ère qui précède le temps, avant que la Terre ne soit créée, une période où tout n’était que spirituel et immatériel. C’est l’histoire de la naissance de l’univers, de la création des hommes et le récit des intentions du Créateur au sujet des hommes et de leur place dans le cosmos.
Selon les Aborigènes le Temps du Rêve existe toujours et peut être atteint pour des besoins spirituels. Il est possible de communiquer avec les esprits et de déchiffrer le sens des mauvais présages, maladies et autres infortunes.
L’expression « Temps du Rêve » est souvent employée en référence au « temps avant le temps » ou au « temps de la création des toutes choses ». Le terme « Rêve » est quant à lui souvent utilisé pour évoquer l’ensemble des croyance/spiritualité d’un individu ou d’un groupe. Le Temps du Rêve établit les schémas de vie des Aborigènes.
Ce qui est sûr c’est que les « Esprits des Ancêtres » sont venus sur Terre sous différentes formes (humaine ou non) et qu’ils ont donné vie à la terre, aux plantes et aux animaux tels que nous les connaissons aujourd’hui.
Les êtres mythiques du Rêve sont éternels. Si dans les mythes certains ont été tués, ont disparus au-delà des frontières des personnes qui les ont chantés, ont été métamorphosés en éléments physiographiques (par exemple en affleurement rocheux ou en point d’eau) ou se manifestent comme/ à travers des objets rituels (ex : tjurunga), leur qualité essentielle reste intacte.
Dans la croyance aborigène, les êtres mythiques sont toujours vivants. Les lieux où ils exécutèrent certaines actions ou ceux « transformés en autre chose » sont devenus sacrés. C’est autours de ces lieux que les rituels se sont concentrés.
Le Temps du Rêve, en tant que système coordonné de croyances et d’actions, inclut le totémisme. L’homme est considéré comme un élément à part entière de la nature, un élément proche des êtres mythiques ou des espèces animales qui tous ensemble partagent une force de vie commune. Le totem place l’homme dans le Rêve et lui fournit une identité indestructible qui continue sans interruption de la nuit des temps à aujourd’hui et qui sera toujours dans le futur.
À l’origine du monde, Baiame ou Bajame, le Premier Être, lui donna sa forme en la rêvant.
Les légendes
a) Bajame
Au tout début, il n’y avait rien excepté une immense étendue d’eau. La terre, petit à petit, émergea de l’océan originel. C’est le début du Temps du Rêve – là où se trouve le secret de la vie et de l’Univers.
C’et là que naît Bajame, le premier être, celui que les aborigènes nomment « le père de toute chose ».
Selon la légende, Bajame créa un sanctuaire à l’intérieur du temps des rêves. Ce lieu, considéré comme le Paradis, est en fait un lieu de transit pour les âmes humaines après la mort terrestre, un lieu où les pierres magiques sont gardées. Les pierres magiques permettent à Bajame de diffuser son savoir via des shamans lors de rites précies, ou d’aider les malades et nécessiteux.
Bajame est aussi la Mort. C’est lui qui décide d’écourter ou de prolonger la vie de toute chose. Il prend parfois apparence humaine et se mêle au monde.
Bajame dort, et lors de son sommeil il lui arrive de rêver. Ses rêves sont des voyages dimensionnels qui le guident vers le monde des dieux et démons. Ce monde est une enclave sacrée du Paradis où il se fait tuer régulièrement. Lorsque Bajame meurt, le grand Serpent Arc-en-Ciel le saisit et l’emporte sur son dos jusqu’au dieu Darmulum qui le ressuscite. Bajame revient alors parmi les hommes, sous forme de shaman, pour leur dispenser les connaissances nouvelles qu’il a acquises à travers la mort. Il retourne ensuite au Paradis en grimpant le long du Grand Arbre Sacré(situé au centre du monde réel). Dès lors qu’il a atteint le paradis, il se réveille et revient dans le Monde des rêves.
Bajame est l’exemple parfait de la quête de savoir au travers de différentes initiations.
Dans le Temps des Rêves, des forces antagonistes luttent sans merci pour la possession des objets sacrés. De cette guerre naquit une émulation pour enseigner aux hommes les secrets de l’univers et redistribuer les pierres magiques. Bajame, conscient que les hommes ne devraient jamais connaître ces secrets sous peine d’être à jamais déçus de leur condition, rétablit de justesse la situation : il enferme les deux rebelles dans le Temps des Rêves et récupère les pierres.
Il concéda cependant un privilège aux shamans : en suivant des rites très précis, ils pourraient accéder à la félicité originelle du Temps des Rêves pour un très court instant.
b) Le Serpent Arc-en-Ciel
Bajame n’est donc pas le seul être à vivre dans le Temps des Rêves. Le Serpent Arc-en-Ciel, un serpent géant vit également au Paradis. Il est dit de lui qu’il laisse parfois sa trace dans le monde des hommes sous forme d’un arc-en-ciel. On raconte également qu’au commencement, la Terre était plate. A mesure que le Serpent Arc-en-Ciel se fraya un chemin à travers le pays, les mouvements de son corps soulevèrent les montagnes et creusèrent le lit des rivières. A chaque nouvelle ondulation de son gigantesque corps multicolore un nouveau paysage se dessinait.
C’est la créature la plus grosse du Temps de Rêves. A la fin, fatigué par ses efforts pour modeler la Terre, il rampa dans un trou d’eau pour se rafraîchir et se reposer.
Le Serpent Arc-en-Ciel est un thème récurrent dans la mythologie aborigène. Habitant permanent des points d’eau, le Serpent contrôle la ressource naturelle la plus précieuse : l’eau.
Comme tous les mythes aborigènes, les histoires varient en fonction des régions et de leurs spécificités géographiques. Chez les tribus de la région du nord de l’Australie, qui connaissent la mousson, on rapporte une légende où le Serpent Arc-en-Ciel se bat contre le soleil.
Un des mythes raconte que le Serpent Arc-en-Ciel créa les lois auxquelles tous les êtres devaient obéir. Cependant, certains ne respectèrent pas ces lois. Le Serpent Arc-en-Ciel dit alors : « Ceux qui respecteront mes lois seront récompensés – je leur donnerai forme humaine. Ceux qui enfreindront mes lois seront punis et transformés en pierres, il ne marcheront plus jamais sur la terre. »
Les rebelles devinrent pierres et se changèrent en montagne et collines; ceux qui respectèrent les lois devinrent humains. Le Serpent donna à ces derniers leur propre totem animal, oiseau ou reptile en fonction de leur région. Les tribus étaient connues par leur totem. Afin que personne ne meurt de faim, le Serpent Arc-en-Ciel décida qu’aucun homme ne pourrait manger son propre totem, seulement les autres totems. De cette façon, il y aurait de la nourriture pour tout le monde.
Les tribus vivaient ensemble sur la terre que leur avait offert le Serpent Arc-en-Ciel, Mère de la vie, et ils savaient que la terre serait pour toujours la leur, personne ne pourrait jamais la leur prendre.
Je vous conseille une courte vidéo qui vous présentera la légende du Serpent Arc-en-Ciel de façon simple et du point de vue aborigène: http://dl.nfsa.gov.au/module/1565/
Les mythes aborigènes sont nombreux et fascinants. L’interdiction de l’inceste, la création des paysages, la musique, tous les thèmes sont traités dans les mythes. L’objet de cet article n’est pas d’être exhaustif, mais de vous donner un aperçu des croyances complexes et riches de ce peuple qui a terriblement souffert depuis l’installation anglo-saxonne sur ses terres. Je vous invite donc à faire vos propres recherches sur la mythologie aborigène mais également sur la situation du peuple aborigène aujourd’hui.
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